Biomécanique

Eléments de locomotion pour assurer le bien-être du cheval au travail

septembre 27, 2020

 

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Physique, mental, émotionnel. Trois parties d’un même individu reconnaissables, isolables et tellement indissociables. Si définir le bien-être du cheval au travail aujourd’hui est en cours d’étude et fait souvent débat, respecter autant que possible les composantes physiques, mentales et émotionnelles qui le déterminent en est certainement une bonne approche.

Pour respecter l’intégrité mentale et émotionnelle du cheval, nous pouvons connaitre et interpréter son comportement en nous appuyant sur les connaissances de la recherche en éthologie. De la même façon, pour respecter son intégrité physique lors du travail, il faut comprendre comment son corps fonctionne dans le mouvement et reconnaître les contraintes engendrées par la présence et les actions d’un cavalier sur son dos.

Immédiatement, penser au bien-être physique du cheval au travail, nous emmène vers l’absence de perception de douleur et une sensation de relâchement. Ces éléments sont-ils compatibles avec la pratique de l’équitation ? Voici quelques éléments à prendre en compte.

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Les messages douloureux sont traités par le système nerveux, relayés par les nerfs. Les vertèbres abritent en leur centre la moelle épinière d’où partent les nerfs spinaux. Dans certaines postures et attitudes, ces nerfs peuvent être mécaniquement soumis à rude épreuve lors de la pratique de l’équitation. Lorsque les angles articulaires se ferment, les nerfs peuvent se retrouver coincés sur leur trajet, engendrant un inconfort certain. A contrario, si l’angle entre les articulations des vertèbres est ouvert, le passage du nerf est libéré et la position devient agréable. L’élément important à comprendre dans la locomotion du cheval ici est que lorsque le dos du cheval adopte globalement une flexion, il « monte », les facettes articulaires sont ouvertes. Si le dos est creux, il est en extension, il « descend », le passage des nerfs est restreint.

Appy 1Extension globale du rachis et fermeture des facettes articulaires entre les vertèbresappy2 neutreapyy 3

Le cheval peut porter un cavalier et réaliser des efforts tout en étant relâché grâce à un fonctionnement harmonieux des chaines musculaires sollicitées lors de sa locomotion. Nous pouvons distinguer les chaines musculaires ventrale et dorsale, selon leur situation, réciproquement en-dessous ou au-dessus de la colonne vertébrale. Un équilibre entre les contractions fournies par chacune des chaines peut permettre au cheval de porter un cavalier dans toutes les allures efficacement et dans le relâchement. Lors d’une attitude en ouverture des facettes articulaires, la chaine musculaire dorsale sera majoritairement en contraction excentrique (dans le sens d’un allongement des fibres) ou isométrique (sans modification de leur longueur) et la chaine musculaire ventrale majoritairement en contraction concentrique (contraction des muscles abdominaux pour soutenir le dos).

Le cheval au travail peut évoluer dans un équilibre horizontal, au naturel, comme s’il était rênes longues, ou en descente d’encolure ; le nez vers le sol ou en place avec un report de son poids sur l’arrière-main ou encore au rassemblé avec un réel recul de son centre de gravité. Plus le cheval redresse la tête et l’encolure, plus le risque de fermer les facettes articulaires est important. Pour autant, si la demande du cavalier est réalisée dans la compréhension et le relâchement, le cheval peut redresser son attitude sans en souffrir. Mais à plusieurs conditions :

  • Il faut qu’il ait suffisamment de force pour le faire, au niveau de l’avant-main pour pouvoir l’alléger, au niveau du dos pour transmettre le mouvement et au niveau de l’arrière-main pour supporter davantage de poids.
  • L’effort doit être récompensé pour éviter les tensions musculaires, notamment en permettant au cheval de s’étendre à nouveau si la demande concernait un effort d’équilibre vers le rassemblé. En conséquence, la durée pendant laquelle le cheval peut donner l’effort sans se crisper doit être bien évaluée par le cavalier.
  • L’encolure ne doit pas être raccourcie (donc les mains ne doivent pas reculer…) pour obtenir une attitude. Cela permet notamment au système ligamentaire du dos de rester en tension pour maintenir passivement la bonne orientation vertébrale. C’est une condition sine qua non pour que le rachis puisse assurer son rôle de transmission entre l’avant-main et l’arrière-main.
  • La progression dans les demandes doit être respectée, en termes d’échauffement du système musculo-squelettique, et en termes d’ordre de difficulté dans les différentes attitudes. Le vieil adage dit « il faut déplier avant de plier »…

Nous revenons ici à la nécessité d’avoir une vision globale incluant physique, mental et émotionnel du cheval. Si la communication du cavalier avec son cheval est à double sens, le cheval est alors dans la possibilité de comprendre les demandes. Il est dans une logique d’apprentissage où le fait de fournir un effort dans la bonne direction est récompensé. Alors il devient motivé pour reproduire l’attitude et la locomotion demandées; le relâchement musculaire s’installe naturellement.

tableau recap

Anne d’Hautefeuille – Ostéopathe équin, BFEE2 
Ludovic d’Hautefeuille – Expert fédéral d’équitation éthologique, BFEE3
Co-auteurs du livre « Le cheval en mouvement » de la collection Les Univers La Cense

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